Thursday, January 17, 2013

Neige de janvier .



Neige de janvier  ou  le temps du blanc :)
Il  était encore  tôt ce matin ,  la lumière naissante de l'aube ,  timide  et rose effaçait  en douceur  les derniers lambeaux de cette  nuit   glaciale ,sur l'horizon de gros nuages   prenaient forme , se poussant  ,    au rythme des bourrasques de vent ,    quelques flocons   serrés les uns contre les autres commençaient à virevolter avec exubérance,   ils semblaient pourtant hésiter  à descendre , tournoyant tel du    duvet de canneton   au gré des gifles  glacées du mistral ,   sur le macadam  sombre et  humide  , rongé par de grosses   plaques étoilées de  givre   ils se posaient  çà et là    , les premiers tels des farfadets  disparaissaient au contact du sol , le froid se faisant plus vif les suivants  s'installaient escamotant le gris sale des calades ....il neigeait !!!!
Bien au chaud derrière le double vitrage de la cuisine , je regardais avec des yeux d'enfant ,  mon  village devenir tout autre,  il semblait en ce moment  bien   différent du hameau  provençal  d'hier   ,  il y a quelques jours  encore il  avait  un aspect  charmeur avec  ses façades  gaies et  rassurantes aux   teintes ocre  mélangées  de  rose léger  à l'image d' un baiser  volé ,  les toitures de coutume  jaune de Naples ou vermillon  usé   qui à  l 'ordinaire  semblaient toujours onduler   sous  les pluies diluviennes de  printemps    ,     se raidissaient ce matin   en un silence ouaté  sous cette   fine couche de   blanc , quant aux   cyprès de coutume  toujours ployés de vert sombre à cet instant   devenaient petit à petit  couleur cendre , en écartant avec délicatesse  leurs rameaux tels des  doigts comme   pour en happer  les maigres  flocons   ,   les  racines quand à elles  bien ancrées  au bel été dans  des herbes  craquantes et rousses  flirtaient  dorénavant   entre   des touffes devenues d'un beau   gris-bleu  grace aux fées   gelées
A travers les volutes de ma tasse  café se dessinait  une belle   envie de balade pour  fouler cette  neige de janvier l'entendre crisser sous mes pas
Mais avant de partir pour tutoyer cette  campagne raidie de froid , je  programmais le four pour  un pain d'épices à la guinness   ,  cuisson que je souhaitais  parfaite malgré mon projet de fuite ,  heureuse à la  pensée des  effluves  rassurantes et sucrées qui m'accueilleraient  lorsque dans une heure ou deux ,   frigorifiée je rentrerai   à la maison
Rapidement emmitouflée de mon vieil et  difforme pull irlandais  ,  d'une écharpe rouge aussi longue qu'une chaîne d'arpenteur ,le tout complété  par  mes vieilles bottines noires ,   j 'empruntais ainsi attifée   la Courrejho ,  calade   bordée  dans ses premiers mètres  de maisons fort belles,  rendues austères par le froid  de janvier   puis avec nonchalance  elle s'étire en une petite côte qui semble dissuasive  pour le promeneur du dimanche ,  certes ,   un peu raide de prime abord   mais ensuite  en  bonne fille elle vous offre   la   clef  pour   une évasion réussie  vers  un  maquis  sauvage  qui sans crier gare vous saute  au visage ,tel un amant avide d'amour   ,   de ces entrailles aujourd'hui devenues blanches on embrasse  d 'un  regard  admiratif  ,les collines bleutées qui enserre ce paysage  du Luberon
Dire qu'il faisait froid n'était pas   mensonge  ,mais  ce petit désagrément se désintégrait au fil  des traces laissées dans la neige , tout n'était  que silence ,les vignes dénudées semblaient grelotter de froid ,les feuilles rousses restées accrochées aux chênes  s'agitaient dans un  bruit sec de  papier froissé ,les olives fripées par le gel  et  oubliées sur le sol se faisaient étrangement présentes sur la neige ,      les flocons devenaient plus  piquants ,en fermant les yeux on les entendait tomber sur le sol gelé telles  des aiguilles de verre  ,  au loin un son de carillon ,je pensais sur l'instant comme réveillée en sursaut à  l'horloge du village , je comptais , un , deux , trois , quatre , cinq ...puis oubliais cette cloche qui égrenait au  gré du vent les heures  passées  , celles qui rythment  tel un métronome notre vie de tous les jours  ..... la fuite du temps s'imposait brutalement à moi   tout  aussi coupant que la réalité du froid qui me rougissait les doigts ,ou de  cette neige  fine qui soulignait tout sur son passage tel un peintre barbouillant avec passion  sa toile , le temps .....la  cruelle réalité du temps qui passe  sur tout  en se souciant de rien ...
Le mistral se lève   plus froid  encore qu'au lever du jour ,   la température s'affiche fièrement  en dessous de zéro quand au    ressenti il est lui aussi   en chute libre  , mon APN , plus frigorifié que moi se refuse à tout autres prises de vue  ...sans doute est-ce   le signal  pour quitter ces chemins creux ou tout n'est plus que silence ...... la neige redouble ..au loin le village apparaît  avec ses blanches   toitures  coiffées à la diable de    cheminées poussant de généreuses  volutes bleutées .
Je pense avec gourmandise aux suaves odeurs de pain d'épices qui  doivent déjà embaumer ma cuisine ....plus que quelques pas ...